RS&DE : L’oasis de la Vallée de la mort. J’ai écouté hier la série historique « Hell on Wheels », qui revisite les événements ayant mené à la construction du premier chemin de fer transcontinental. Cette série met en vedette, entre autres, Thomas Durant, un homme d’affaires, qui bénéficie pour accomplir ses travaux de subventions gouvernementales. M. Durant ainsi que d’autres organisations privées ont su profiter des fonds publics dédiés à l’accomplissement des grands ouvrages américains pour se bâtir d’immenses fortunes. Mon but, aujourd’hui, n’est pas d’insinuer que les changements, suite à la sortie du budget fédéral 2012, visant à favoriser un peu plus l’aide directe plutôt que les crédits d’impôt viendront enrichir les entrepreneurs mal intentionnés, mais plutôt nuire à l’épanouissement des jeunes entreprises. En mars dernier, le Ministre d’État aux Sciences et à la Technologie, Gary Goodyear, a annoncé que le gouvernement allait révéler au cours de la prochaine année un nombre de changements « énergiques » à la façon dont les sociétés canadiennes ont accès aux fonds de capital-risque et de recherche et développement. Ces changements suivront les recommandations du rapport Jenkins, qui considère le modèle de financement actuel du programme de Recherche scientifique et développement expérimental (RS&DE) comme étant inefficace et requérant une réorganisation significative afin de s’assurer que l’argent soit décerné aux bonnes entreprises et industries. L’une des nouvelles mesures inspirées du rapport Jenkins qui seront prises par le gouvernement au cours de l’année visera à soutirer 500 millions de dollars des 3,6 milliards dédiés à la RS&DE chaque année pour l’investir dans du financement direct. De cette somme, 110 millions iront bonifier le Programme d’aide à la recherche industrielle du CNRC (PARI). Alors que le reste servira à rebâtir l’industrie du capital-risque canadienne, une décision que plusieurs considèrent comme hâtive et imprudente. Selon eux, ces changements sont mal avisés. Ils dénoncent le fait que l’étude effectuée par le comité d’experts du rapport Jenkins s’est fortement appuyée sur une étude du ministère des Finances du Canada, qui a conclu que, dans une période de 5 ans, seulement 2 % des récipiendaires de crédits d’impôt à la RS&DE ayant évolué à plus large échelle font encore de la recherche et du développement. Cette analyse ne montre, cependant, pas l’autre côté de la médaille en omettant de présenter les taux des entreprises qui reçoivent de l’aide directe. De plus, les entreprises présentées dans cette étude correspondent à celles qui ont été incorporées de 2000 à 2004, soit à la suite de l’éclatement de la bulle technologique en 2000. Ces experts arguent également que plus de 20 000 sociétés privées sous contrôle canadien (SPCC) profitant du programme de la RS&DE résident dans une zone communément appelée la « Valée de la mort ». Les sociétés se retrouvant dans cette région sont des entreprises en démarrage dépourvues de capitaux qui ne peuvent profiter des subventions gouvernementales dédiées à la recherche fondamentale et de la recherche appliquée ou de fonds privés provenant d’anges investisseurs. Ainsi, pour plusieurs d’entre elles, la seule source de financement externe provient des crédits d’impôt à la RS&DE. Un autre point qui vaut la peine d’être mentionné par rapport aux avantages des crédits d’impôt RS&DE est que ces derniers font preuve d’une neutralité à la fois sectorielle et régionale. Tandis que l’aide directe est concentrée de façon disproportionnelle au Québec et dans la région des Maritimes. Ces fonds vont également à une poignée d’industries, dont la foresterie, l’aérospatiale et l’agriculture. En détournant ainsi une partie de l’argent dédié au programme de la RS&DE, le gouvernement canadien affectera le sort de nombreuses jeunes entreprises. De même que le gouvernement américain dans « Hell on Wheels », il favorisa aussi des secteurs d’activité plus que d’autres. Toutefois, il est encore tôt pour nous prononcer sur toute l’ampleur qu’auront ces changements. Bien que M. Goodyear nous ait promis plus de détails au cours des prochains mois, il se peut que ceux-ci n’accompagnent que la parution du prochain budget. Crédit photo : Aenigmatis-3D via Pixabay.